L’essor des médias sociaux et plus particulièrement de YouTube a entraîné un phénomène inquiétant : l’achat de vues, d’abonnés et de likes. Si cette pratique peut sembler anodine pour certains, elle soulève néanmoins des questions juridiques importantes concernant la responsabilité des hébergeurs et les obligations légales qui en découlent. Cet article se propose donc d’examiner ces aspects sous l’angle du droit français.

Comprendre le phénomène de l’achat de vues sur YouTube

Le phénomène de l’achat de vues est né avec l’émergence des plateformes de partage de vidéos telles que YouTube. Les vidéastes cherchant à gagner en visibilité sont parfois tentés d’avoir recours à des services leur permettant d’acheter des vues, des abonnés ou encore des likes pour leurs vidéos. Cette pratique, bien que répréhensible, est difficilement détectable car les comptes achetés sont généralement créés par des robots.

S’il est évident que cette pratique peut engendrer une distorsion dans la compétition entre les vidéastes, il convient également d’examiner les conséquences juridiques qui peuvent découler de l’achat de vues sur YouTube, notamment au regard de la responsabilité des hébergeurs.

La responsabilité des hébergeurs en matière d’achat de vues sur YouTube

En France, la responsabilité des hébergeurs est définie par la loi pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN) du 21 juin 2004. Cette loi transpose en droit français la directive européenne sur le commerce électronique de 2000 et vise à encadrer la responsabilité des prestataires techniques tels que les hébergeurs ou les fournisseurs d’accès à internet.

Selon l’article 6-I-7 de la LCEN, un hébergeur n’est pas responsable des informations stockées sur sa plateforme si :

  • il n’a pas effectivement connaissance de leur caractère illicite ou
  • s’il agit promptement pour retirer ces informations ou en rendre l’accès impossible dès qu’il en a connaissance.

Dans le cas de l’achat de vues sur YouTube, il est donc nécessaire de déterminer si cette pratique peut être considérée comme illicite et si les hébergeurs ont effectivement une obligation légale d’agir pour y mettre fin.

L’achat de vues sur YouTube : une pratique illicite ?

Le premier élément à prendre en compte pour déterminer si l’achat de vues est une pratique illicite au sens de la LCEN est son caractère trompeur. En effet, cette pratique consiste à gonfler artificiellement le nombre de vues d’une vidéo dans le but d’améliorer son référencement et sa visibilité. Or, selon l’article L121-1 du Code de la consommation français, une pratique commerciale est trompeuse si elle repose sur des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur et si elle altère le comportement économique du consommateur.

Ainsi, l’achat de vues pourrait être considéré comme une pratique commerciale trompeuse au sens du Code de la consommation, ce qui pourrait entraîner des sanctions pénales pour les vidéastes concernés. Toutefois, il convient de noter que cette qualification reste sujette à interprétation et dépendra notamment des circonstances entourant chaque cas d’achat de vues.

Quelles obligations légales pour les hébergeurs face à l’achat de vues sur YouTube ?

Dans l’hypothèse où l’achat de vues serait considéré comme une pratique illicite au sens de la LCEN, les hébergeurs auraient une obligation d’agir promptement pour retirer ces informations ou en rendre l’accès impossible dès qu’ils en ont connaissance. Cependant, il est important de souligner que les hébergeurs ne sont pas tenus de surveiller activement le contenu qu’ils hébergent, conformément aux dispositions de l’article 6-I-7 de la LCEN.

En ce qui concerne YouTube, la plateforme dispose déjà d’un système permettant de détecter les vues artificielles et les comptes robots. Néanmoins, ce système n’est pas infaillible et peut parfois laisser passer certaines pratiques frauduleuses. Il appartient donc aux utilisateurs de YouTube et aux tiers ayant connaissance de telles pratiques d’en informer l’hébergeur afin qu’il puisse prendre les mesures nécessaires.

Conclusion

En définitive, l’achat de vues sur YouTube soulève des questions juridiques intéressantes concernant la responsabilité des hébergeurs et les obligations légales qui en découlent. Si cette pratique peut être considérée comme illicite au regard du droit français, il appartient néanmoins aux hébergeurs d’agir promptement pour y mettre fin dès qu’ils en ont connaissance. Les utilisateurs de YouTube et les tiers sont donc invités à signaler toute pratique suspecte afin de contribuer à lutter contre ce phénomène.